Des tee-shirts à moins de trois euros, livrés en quelques jours. Une mode rapide, tentante, omniprésente. Mais derrière les prix cassés, des dégâts invisibles. Le Sénat s’apprête à dire stop. Une loi pourrait tout changer.
Fast-fashion : vers la fin des vêtements ultra bon marché en France ?

7 220 références par jour. Shein tourne à une cadence folle. Chaque jour, des milliers de vêtements, de chaussures, d’accessoires déferlent en ligne. Une machine bien huilée. Et une pollution massive, rarement évoquée quand on passe commande. Aujourd’hui, le gouvernement s’en mêle.
Fast-fashion : l’ère de l’excès
Si vous avez déjà commandé un pull à 5 € ou une robe à 7 €, vous avez participé, sans le vouloir, à un modèle qui explose tous les compteurs. La fast-fashion, ce sont 3,2 milliards de vêtements mis sur le marché chaque année en France. Soit 48 produits textiles par habitant, selon l’ADEME. À ce rythme, 35 vêtements sont jetés chaque seconde. Et ça ne ralentit pas.
À la tête de ce système : Shein, plateforme chinoise devenue incontournable, qui inonde Internet de nouveautés à prix mini. Des vêtements qui arrivent vite, coûtent peu… et polluent beaucoup. Chaque article a une empreinte carbone élevée, souvent produit loin, dans des conditions sociales contestées, puis expédié en colis individuels.
Ce mardi 10 juin 2025, le Sénat vote une proposition de loi qui veut frapper fort. Le texte, déjà passé à l’Assemblée il y a plus d'un an, vise les plateformes de “mode ultra-express” comme Shein ou Temu. Objectif : ralentir la cadence, et obliger à plus de transparence.
Première mesure phare : afficher des messages incitant à la sobriété, la réparation ou le recyclage. Ensuite, interdire toute publicité, y compris sur les réseaux. Les influenceurs ne pourront plus promouvoir ces marques, sous peine de sanctions. Enfin, les entreprises les plus polluantes devront payer une écocontribution, en fonction de la “durabilité” de leurs produits. En clair : plus un vêtement est éphémère, plus il coûtera cher à l’entreprise.
Shein en ligne de mire, et ce n’est pas un hasard
Le texte vise clairement Shein, et pas les enseignes comme H&M, Zara ou Kiabi. Pourquoi ? Parce que Shein explose tous les records. Une étude relayée par l’AFP montre que la plateforme a publié, entre le 22 mai et le 5 juin, 7 220 nouvelles références par jour. À comparer avec les 290 d’H&M dans la catégorie “femmes”, et 50 dans celle des hommes. Un gouffre.
Cette stratégie permet de capter l’attention, générer des achats d’impulsion… et produire des déchets sans fin. D’où la volonté de taper là où ça fait mal : la pub, les marges, la visibilité. Le message est clair : l’État veut décourager ce modèle de vente “à la chaîne”.
Shein ne cache pas son inquiétude. Quentin Ruffat, son porte-parole en France, alerte : « Cette loi, si elle vient à passer, pénalisera directement le portefeuille de nos clients. ». Car si la loi passe, les vêtements ultra-bon marché pourraient devenir moins accessibles. Une taxe sur les petits colis (deux à quatre euros) est aussi prévue pour les entreprises hors UE. Elle concernerait surtout Shein… mais aussi Temu.
Côté gouvernement, on assume. La ministre Agnès Pannier-Runacher y voit « un bon point de départ pour agir au niveau européen ». Le texte, s’il est validé, devra ensuite être harmonisé avec Bruxelles.