Les équilibres fragiles des aides au logement étudiant pourraient bien être redessinés dans les prochains mois. Une refonte qui avance à pas feutrés mais dont les effets risquent d’être bien plus tonitruants.
Logement : les APL coupées pour la moitié des étudiants ?

Le 10 juin 2025, plusieurs sources ont confirmé une réforme structurelle des aides personnelles au logement (APL), dans le cadre du projet de refonte du financement des bourses étudiantes. Cette initiative, qui touche directement plus de 1,7 million de jeunes en France, suscite de nombreuses inquiétudes.
APL : réformer leur octroi pour cibler les ménages les moins aisés
Le financement de la réforme des bourses étudiantes, évalué à 700 millions d’euros, repose sur une série d’économies budgétaires. En première ligne : une réduction des APL, ciblée sur les étudiants considérés comme les moins précaires.
Selon un article des Échos, le gouvernement envisage de recentrer les APL sur les seuls étudiants boursiers, ceux en logement social ou relevant de critères sociaux stricts. Une décision confirmée par un rapport parlementaire révélé le 12 juin sur BFMTV, qui préconise de réserver les aides au logement aux profils « les plus vulnérables ».
La Cour des comptes, dans son rapport public du 19 mars 2025, ne fait pas mystère de son positionnement. Selon l’institution, « l’efficacité redistributive des APL en direction des jeunes est largement perfectible ». Le document révèle que près de 42 % des jeunes bénéficiaires ne sont ni boursiers ni hébergés en logement social, alimentant ainsi le sentiment d’un dispositif trop large et peu ciblé. Ainsi, la réforme pourrait supprimer ces aides pour près de la moitié des bénéficiaires, voire plus.
Faire 1,6 milliards d’économies sur le dos des étudiants ?
Le gouvernement ne compte pas s’arrêter aux APL. Il prévoit aussi de supprimer la niche fiscale pour enfant étudiant rattaché au foyer fiscal, soit un abattement d’environ 3 000 euros par an et par enfant. Cette mesure, destinée à financer la réforme des bourses, pourrait rapporter près d’un milliard d’euros, selon les estimations du ministère citées dans Les Échos.
En additionnant la restriction des APL et la suppression de la niche fiscale, ce sont près de 1,6 milliard d’euros qui seraient redirigés vers les bourses. Une redistribution qui suscite débat : qui gagne, qui perd ?
Car si la réforme vise à augmenter significativement le montant et le nombre de bourses attribuées, elle le fait au détriment d’aides considérées comme universelles. L’idée de troquer une aide large contre un soutien plus ciblé est loin de faire consensus, notamment chez les étudiants issus de classes moyennes, qui craignent de devenir les grands oubliés du nouveau système.
Les étudiants inquiets : vers une (nouvelle) crise du logement des étudiants ?
Du côté des syndicats étudiants, la réforme est reçue avec circonspection. Le rapport parlementaire évoqué par BFMTV rappelle que « le versement des APL ne doit pas être automatique pour tous les étudiants, mais réservé à ceux qui en ont le plus besoin ». Une ligne rouge pour les organisations étudiantes, qui y voient un démantèlement silencieux d’un des piliers du modèle social français.
Les critiques se font aussi entendre dans les rangs parlementaires. Certains élus dénoncent une réforme inéquitable, qui fragilise les étudiants ne rentrant pas dans les nouvelles grilles de critères, sans leur offrir de solution alternative.
En filigrane, une question hante les couloirs de l’Assemblée : faut-il sacrifier la solidarité horizontale pour renforcer la solidarité verticale ? Autrement dit, peut-on continuer à soutenir tous les étudiants ou faut-il recentrer les moyens sur les plus fragiles ? Ce dilemme traverse le projet de loi de finances 2025, dont l’annexe 35 sur l’enseignement supérieur mentionne explicitement des « mesures d’économies sur les aides indirectes » pour financer l’élargissement des bourses.